Jean-Baptiste Faure

Jean-Baptiste Faure

Date de naissance 15.1.1830 à Moulins, Auvergne, France

Date de décès 9.11.1914 à Paris, Île-de-France, France

Jean-Baptiste Faure

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Jean-Baptiste Faure est un baryton français, né à Moulins (Allier) le 15 janvier 1830 et mort à Paris le 9 novembre 1914.

Ce chanteur d'opéra, l'un des plus célèbres du XIXe siècle, fut également un collectionneur essentiel de l'Impressionnisme et associé du marchand de tableaux Paul Durand-Ruel (1831-1922).

Biographie

Le chanteur

Après un passage à la maîtrise de l'église de la Madeleine, il entre en 1851 au Conservatoire de Paris dans les classes des ténors Théodore-François Moreau-Sainti et Louis Ponchard. Pourvu d'un premier prix de chant et d'un premier prix d'opéra-comique, il débute le 20 octobre 1852 à l' Opéra-Comique dans Galatée de Victor Massé (rôle de Pygmalion). Il y interprète les uvres du répertoire, telles que Joconde de Nicolas Isouard, et en crée de nombreuses autres parmi lesquelles L'Étoile du Nord de Giacomo Meyerbeer (Peters) en 1854, Jenny Bell de Daniel-François-Esprit Auber (Greenwich) en 1855, Manon Lescaut d'Auber (d'Hérigny) en 1856, Quentin Durward de François-Auguste Gevaert en 1858 et Le Pardon de Ploërmel de Meyerbeer (Hoël) en 1859. Il épouse la même année sa partenaire de scène, la soprano Caroline Lefebvre (1828-1905). L'un de leurs témoins de mariage n'est autre que Meyerbeer.

En 1860, il se produit à Covent Garden avant de faire son entrée à l'Opéra de Paris en 1861 dans Pierre de Médicis de Joseph Poniatowski.

Il y chante Don Giovanni de Mozart (rôle-titre), La Favorite (Alphonse XI) de Gaetano Donizetti, La Pie voleuse et Guillaume Tell de Gioachino Rossini (rôle-titre) et Les Huguenots de Meyerbeer (le duc de Nevers). En 1869, il interprète Méphisto pour l'entrée au répertoire du Faust de Charles Gounod. Il y crée aussi les rôles de Pédro dans La Mule de Pédro de Victor Massé en 1863, Nelusko dans L'Africaine de Meyerbeer en 1865, Rodrigue dans Don Carlos de Giuseppe Verdi en 1867, Hamlet dans l'opéra-homonyme d'Ambroise Thomas en 1868, le Fou dans La Coupe du roi de Thulé d'Eugène Diaz en 1873 et Charles VII dans Jeanne d'Arc d'Auguste Mermet en 1876. Durant la guerre de 1870, il s'installe en Belgique puis en Angleterre, choix qui lui sera reproché, comme à d'autres artistes, par plusieurs journaux à son retour[1], tel le caricaturiste Bertall dans le journal L'Illustration qui légende ainsi le tableau de Manet, Le Chemin de fer, présenté au Salon de 1872 : « Le Chemin de fer de M. Manet, ou le départ de M. Faure pour l'Angleterre, ce qui explique l'air navré. Ce n'est pas gai non plus pour M. Manet. »

Professeur de chant au conservatoire de Paris de 1857 à 1860, Faure est l'auteur de traités pratiques sur le chant : La Voix et le Chant (1886) et Aux jeunes chanteurs (1898). Il laisse également plusieurs recueils de mélodies à caractère religieux dont certaines devinrent très populaires, telles le Sancta Maria, Le Crucifix d'après Victor Hugo et Les Rameaux. Il popularisa Minuit, chrétiens d'Adolphe Adam crée à Noël 1847, qu'il interpréta dans tous ses récitals. Il participa également à la création des oratorios de Charles Gounod Rédemption (1884) et Mors et Vita (1886). Le 21 novembre 1887, il crée à l'église de la Madeleine le O salutaris pour baryton et orgue de Gabriel Fauré, que le compositeur lui a dédié.

Le collectionneur

Faure commence à collectionner dès les années 1850, lorsqu'Ambroise Thomas le met en contact avec les peintres Jean-Auguste-Dominique Ingres,Hippolyte et Paul Jean Flandrin. Il s'intéresse par la suite à l'école de 1830 : Jean-Baptiste Corot, Eugène Delacroix, Jules Dupré, etc... Pour la première exposition impressionniste organisée en 1874, Faure prête 2 Degas et 9 Monet dont Plage à Sainte-Adresse. La presse de l'époque y lit la marque de l'excentricité d'une vedette orgueilleuse de l'Opéra. Quand le collectionneur Hoschédé est mis en faillite, il rachète en salle des ventes Le Déjeuner sur l'herbe d'Édouard Manet.

Grand amateur du peintre, il fait l'acquisition de 67 de ses uvres, dont Le Joueur de fifre, mais aussi de 63 toiles de Claude Monet dont Le Pont d'Argenteuil et d'autres uvres d'Edgar Degas (16 toiles), Camille Pissarro (37 toiles) et Alfred Sisley (58 toiles), qu'il installe en Angleterre pendant 4 mois pour se consacrer à la peinture. Il présente sa collection dans son appartement parisien du 52 boulevard Haussman mais en conserve une partie à Étretat dans sa villa « les Roches » rachetée au comte d'Escherny[3], où se croisent les compositeurs Charles Gounod, Jules Massenet, Ambroise Thomas, les écrivains et librettistes Ludovic Halévy, Guy de Maupassant et les peintres James Abbott McNeill Whistler, Claude Monet, Edgar Degas, Anders Zorn. En 1880, la critique internationale considère ces lieux comme la « Galerie de l'art moderne ». Une partie des vues d'Étretat de Monet, pour lequel Faure met une de ses villas à disposition en 1882 et 1891, a été peinte à sa demande[4]. Il commande aussi son portrait à différents peintres dont Édouard Manet (en Hamlet)[5], Giovanni Boldini (en Méphistophélès) et Marcellin Desboutin (en Guillaume Tell) . En 1881, il commande à nouveau à Manet son portrait à l'occasion de la remise de sa légion d'honneur. Mais le tableau déplaît à Faure qui commande un autre portrait à Anders Zorn.

À la mort de Manet, il défend néanmoins l'uvre du peintre en vente publique. Il agit en banquier-associé du marchand Paul Durand-Ruel, lui permettant d'organiser les expositions impressionnistes aux États-Unis où il chante régulièrement. Faure réalise régulièrement sa collection au cours de sa vie, soit en vente publique (1878, 1881, etc..), soit au travers de la galerie de son associé, auquel il confie ses tableaux pendant la guerre de 1870 afin de la mettre à l'abri à Londres, où ils habitaient des maisons voisines à Brompton Crescent[6]. À la fin de sa vie, il se séparera de l'essentiel de ses pièces, ne conservant que quelques toiles d'Ingres, Prud'hon, Manet, Degas, Sisley. En revanche, coïncidence ou choix délibéré, il ne collectionna jamais ni Auguste Renoir ni Paul Cézanne, tous deux fervents wagnériens.

Les relations entre les peintres et le collectionneur ne sont pas toujours cordiales : Monet[7] et la famille de Manet[8]voit en lui un « prédateur qui achète à bas prix et revend deux ans plus tard 20 fois plus cher »[9]. Degas en fera les frais et sera condamné après un procès, à rembourser Faure pour des toiles insuffisamment travaillées.

Vincent van Gogh dans la lettre du 28 janvier 1889 de Arles écrit à son frère Théo : "Tu as vu comme moi défiler dans la petite vitrine dune maison dencadrement de la rue Lafitte une partie de la collection Faure nest ce pas. Tu as vu comme moi que ce lent défilé de toiles autrefois méprisées était étrangement intéressant. Bon. Mon grand désir serait que toi tu eusses plus tôt ou plus tard une série de toiles de moi lesquelles pourraient elles aussi défiler juste dans la même vitrine."

Bibliographie

  • Joël-Marie Fauquet, « Jean-Baptiste Faure » in Dictionnaire de la musique en France au XIXe siècle, Fayard, Paris, 2003 (ISBN 9-782213-593166)
  • Sophie Monneret, L'Impressionnisme et son époque, 2 vol., Denoël, 1978 - Rééd. coll. Bouquins, Robert Laffont, 1987 (ISBN 978-2221055038)
  • Paul Durand-Ruel, Souvenirs d'un marchand de tableaux. Albin Michel, 2005 (ISBN 978-2226-158673)
  • Jean-Pierre Thomas, Étretat autour des années 1900 : Promenade en cartes postales dans la station balnéaire, éditions L. Durand, 1985 (réed. 2000) (ISBN 2-86743-392-4)

Liens externes

Notes et références

  1. Léon Bienvenu, Le Trombinoscope, mars 1873.
  2. Une étude préparatoire de ce portrait fait partie des collections du Metropolitan Museum of Art de New York.
  3. Appelée aussi « Château-Les Roches », la villa fut revendue, transformée en hôtel-restaurant de 1937 à 1950, puis abandonnée et finalement détruite en 1983. Aujourd'hui ne subsistent que les murs de soubassement en silex, à l'emplacement de la villa un peu en hauteur sur la falaise amont dans la ville. C'est aujourd'hui un espace de jeux pour enfants et les souterrains où il empilait ses collections de peinture et de faïences sont devenus des aquariums. In Jean-Pierre Thomas, Étretat autour des années 1900 : Promenade en cartes postales dans la station balnéaire.
  4. Sophie Monneret, L'Impressionnisme et son époque, Denoël, 1978.
  5. Après 34 séances de poses et plusieurs esquisses, le tableau est présenté au Salon de 1877, où il reçoit un accueil sarcastique. Vexé, Faure refuse de payer le prix prévu à Manet au motif que les jambes sont « ratées », n'étant pas les siennes puisque c'est un autre modèle qui avait posé pour le bas du tableau. In Sophie Monneret, op. cit.
  6. Paul Durand-Ruel, Souvenirs d'un marchand de tableaux.
  7. Selon Marthe de Fels dans La Vie de Claude Monet (Gallimard, 1929), Faure avait refusé d'acheter 50 francs un paysage de Vétheuil à Claude Monet en 1872 avec cette explication : «  Ah ! ça non, mon cher ! Il n'y a pas de peinture là-dessus. Moi ce que j'achète, c'est de la peinture, ce n'est pas un bout de toile.  » Des années plus tard, visitant l'atelier du peintre, Faure propose pour la même toile 1 000 francs. Monet explose : «  Ah ! non Faure. Vous n'avez pas de mémoire, mon ami. Ce tableau-là, vous l'avez refusé autrefois pour 50 francs. Vous aurez tous les autres si vous voulez, mais celui-ci, vous me le paieriez 50 000 francs que je ne vous le donnerais pas ! »
  8. « Édouard [Manet] vient de vendre deux tableaux bon marché à Faure qui l'a rançonné ». Lettre de Berthe Morisot en 1882. In Sophie Monneret, op. cit.
  9. Lettre de Monet à Durand-Ruel. In Paul Durand-Ruel, op. cit.
  10. Il existe une autre version plus esquissée à la Kunsthalle de Hambourg
Dernière modification de cette page 26.01.2014 15:19:33

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